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– Cautaerts Michel – je tu il

 

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Je tu(e) il.

Michel Cautaerts DE BOECK UNIVERSITE,15 décembre 2010,464 pages

ISBN-13 : 978-2804115685

Je tu(e) il.

Mortelles blessures d’amour, doubles narcissiques et perversions.
De la séduction traumatisante à la création vicariante
Essai de mythanalyse et psychanalyse des perversions sexuelles et narcissiques.
De Sigmund Freud à Carl Gustav Jung, de Léopold Szondi à Pierre Solié.

Conférence de Michel Cautaerts

Et nous les petits , les obscurs, les sans-grades,
Nous qui marchions fourbus, blessés, crottés, malades,
Sans espoir de duchés ni de dotations;
Nous qui marchions toujours et jamais n’avancions;
Trop simples et trop gueux pour que l’espoir nous berne
De ce fameux bâton qu’on a dans sa giberne;
Nous qui par tous les temps n’avons cessé d’aller,
Ne nous soutenant plus qu’à force de trompette,
De fièvre et de chansons qu’en marchant on répète;
Edmond Rostang L’Aiglon. Acte 2, scène 9.

Un beau matin, Jean-Pascal se pétrifie. Il tremble des pieds à la tête dans les bras de sa jeune épouse qui le remet au lit avec douceur. Il passera sa journée à frémir et pleurer sous la couette. Comment un homme de trente ans, que j’avais vu en pleine forme un an auparavant avait-il pu en arriver là?
Pourquoi la dépression de Juliette résiste-t-elle à un traitement bien conduit? Quelle est l’origine de la stérilité d’Anne, celle des fausses-couches à répétition de Julie? Marie s’enfonce un peu plus chaque jour dans la drogue et l’alcool, sans en comprendre la raison. Toutes les nuits Cécilia rêve de son travail. Surmenée , épuisée, elle se croit incompétente car elle ne réussit pas à faire reconnaître la valeur de son travail par son patron. Telles sont quelques unes des situations qu’engendre la perversion narcissique. S’il existe aujourd’hui de nombreux ouvrages sur ce sujet, très peu abordent les arrières-plans de cette pathologie dont les ravages minent les fondements même de la société.
Le coeur de mon sujet du jour sera la perversion narcissique car c’est elle la plus répandue et celle qui fait le plus de ravages.

Les théories analytiques

Trois caractéristiques ont limité le possibilité de Freud de comprendre les perversions: son incapacité à voir la mère comme mauvaise; son excessive ambition l’a mené à l’exclusion de tous ceux qui osaient contester ses théories; enfin sa volonté de tout ramener à l’oedipe qui ne lui a pas permis une claire analyse du prégénital. Il a fallu attendre les écrits de C.G. Jung, puis les travaux de Mélanie Klein et Bion pour que soit enfin vraiment prise en compte la dimension de la relation archaïque à la mère.
Dans le décryptage des perversions, je me suis appuyé sur les mythes et les contes. En effet, si les contes nous parlent souvent de problèmes proches de loedipe, les mythes ouvrent à la compréhension de la relation archaïque. Je m’appuierai aussi sur la belle conférence de Aimé Agnel: L’autre du Double. 1

La perversion narcissique et le problème du Mal.

Pour se faire une idée du monde de la perversion narcissique, de son atmosphère, rien de tel que de se mettre à l’écoute du conte La Reine des Neiges de Hans Christian Andersen. Il fournit une excellente métaphore pour parler des perversions et de l’origine du Mal. En voici le début:
Voilà ! Nous commençons. Lorsque nous serons à la fin de l’histoire, nous en saurons plus que maintenant, car c’était un bien méchant sorcier, un des plus mauvais, le «diable» en personne.
Un jour il était de fort bonne humeur : il avait fabriqué un miroir dont la particularité était que le Bien et le Beau en se réfléchissant en lui se réduisaient à presque rien, mais que tout ce qui ne valait rien, tout ce qui était mauvais, apparaissait nettement et empirait encore. Les plus beaux paysages y devenaient des épinards cuits et les plus jolies personnes y semblaient laides à faire peur, ou bien elles se tenaient sur la tête et n’avaient pas de ventre, les visages étaient si déformés qu’ils n’étaient pas reconnaissables, et si l’on avait une tache de rousseur, c’est toute la figure (le nez, la bouche) qui était criblée criblée de son.
Le diable trouvait ça très amusant.
Lorsqu’une pensée bonne et pieuse passait dans le cerveau d’un homme, la glace ricanait et le sorcier riait de sa prodigieuse invention.
Ce début reflète l’opinion générale qui veut que le mal soit une privatio boni et fait retomber sur l’humain toute la culpabilité. C.G. Jung s’est élevé contre cette manière de voir et a rendu, dans Réponse à Job, son Ombre au divin, l’Ombre du Soi.

Aux sources de la perversion.

Diverses opinions ont été avancées quant à l’origine de la perversion narcissique. De mon point de vue, il faut tenir compte de deux éléments: un défaut du programme archétypique chez le futur pervers et une déformation de la relation précoce à la mère. Celle-ci a exercé une emprise sur l’enfant qui n’a pu, en réponse aux exigences parentales, que cacher son vrai soi et construire une persona (un faux-self dans le langage de Donald Woods Winnicott).
Selon Jean Laplanche et Gérard Bonnet, le pervers narcissique se vengerait, sa vie durant, d’une séduction excessive de la part de sa mère, séduction qui a submergé les possibilités de défense de soi moi encore fragile. Paul-Claude Racamier met en évidence l’exclusion et la dévalorisation du père dans des familles dysfonctionnelles et/ou incestuelles. Margaret Mahler et Otto Kernberg insistent sur le rôle des précurseurs sadiques du Surmoi et de l’identification à l’agresseur.
Michel de m’Uzan précise, à propos d’un cas extrême de masochisme, qu’à l’origine des grandes perversions très précoces, existe une distorsion dans le programme chromosomique (archétypique).

La formulation jungienne des perversions narcissiques

À la suite de Jung, Pierre Solié a formulé le problème de l’humanité en termes de confrontation du moi au double monstrueux, amalgame résultant de difficultés de différenciation des rapports entre le moi du sujet, le double , le complémentaire, le surmoi et l’idéal du moi. L’analyse mène à la rencontre des dissociations sur lesquelles Jung le premier a tant travaillé. Elles sont liées aux défenses archaïques (clivages et dénis). Le travail analytique vise à l’intégration des parties dissociées, à commencer par celle de l’ombre qui donne accès à la problématique de l’Anima et de l’Animus.

Szondi

Léopold Szondi a travaillé sur les transmission transgénérationnelles. Il fut un précurseur en ce domaine et si ses études n’ont pas abouti à prouver une transmission génétique, elles restent d’actualité. Son test, qui tient du miracle, met en évidence la dynamique de la psyché humaine ce qui le rend très proche de Jung. .

L’alchimie

L’alchimie parle aussi de la perversion, comme je le montrerai, avec un conte de Goethe.

Prévention

La conférence abordera enfin la question de la prévention, puis celle du traitement tant des pervers que de leurs victimes. Et je laisserai la parole à Clarissa Pinkola-Estes pour le mot de la fin.



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