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Norbert CHATILLON : EVOLUTION ET TRANSFORMATION: COMMENT S’ELABORENT CES DEUX THEMATIQUES DANS LA PENSEE DE JUNG

Description

Conférence de Norbert Chatillon, 8 Novembre 2011

Résumé par Vincent Chalmeton :

Les questions sur l’évolution, tant individuelle que collective, comme celles que posent les transformations voulues et subies, imposées de l’extérieur ou poussées depuis l’intérieur de soi, organiquement et psychiquement, sont des questions plus que jamais actuelles. Au lendemain de la publication en français du Livre rouge de Jung, l’auteur se propose d’explorer les notions d’évolution et de transformation, telles que ce livre les illustre dans la transformation de Carl Gustav Jung lui-même.

Le premier point est de positionner les concepts d’évolution et de transformation, ce qui requiert de les travailler à la fois dans les univers de la langue qui les fait se répondre à travers une variété de notions, pas toujours bien traduites. Puis, il faut les resituer dans les univers de leur contexte historique, philosophique et scientifique de la fin du 19ème et du début du 20ème. Enfin, il faut considérer la place qu’ils viennent occuper dans la question du sens, qui est centrale dans la dynamique engagée par les théories de l’évolution. En effet, le temps humain n’est pas la mesure du temps des théories de l’évolution. En proposant le temps intérieur comme fil rouge de son travail, Jung propose de requestionner notre rapport à l’évolution à la lumière de nos transformations.

Sur une question posée à Jung en 1958 pour savoir si nous n’approchons pas de la fin des temps, mais que nous sommes simplement dans un processus de transformation ? sa réponse fut : « Je ne sais absolument pas si nous approchons d’une fin des temps ou si nous sommes simplement dans une phase de transformation ». Ceci est à mettre en regard de l’histoire de son questionnement : « L’énergie du centre se manifeste dans le besoin contraignant, presque irrésistible, de devenir ce que l’on est, à la manière dont tout organisme doit à tout prix parvenir, au moins approximativement, à la forme qui correspond à son être ». Si nous examinons ce propos à la lumière des observations scientifiques relatives à l’évolution, c’est la question du devenir ce que l’on est qui est aujourd’hui essentielle. Questionner, d’un point de vue psychologique, l’évolution et la transformation, interroger la dynamique de ces deux représentations, mérite de les considérer ici comme un couple d’éléments contraires… qui, quelquefois, se contrarient.

En se replaçant dans une perspective de type alchimique, Jung affirme : « Au centre de mes découvertes psychologiques se trouve à nouveau un processus de transformation intérieure : l’individuation. » Il est à noter d’emblée que l’individuation est positionnée par Jung sur le versant de la transformation et non directement depuis l’évolution. Nous serions tentés d’énoncer, dans quelque parodie de Lacan, que l’évolution vient de surcroît. L’évolution n’est jamais assurée, ni garantie, et elle ne va pas de soi. Elle ne s’origine pas d’une nécessité intérieure, elle est l’effet intérieur de transformations le plus souvent contraintes.

Dans une conclusion illustrée par des exemples d’œuvres artistiques, L’auteur considère l’évolution comme facteur de transformations et les transformations comme conditions de l’évolution. Quête de l’identité, revendication de son unité, recherche de la totalité tels sont pour Jung et tout un courant de pensée, les principes directeurs d’une définition de la conscience. Identité, unité et totalité ne peuvent se tenir que par « des processus de centralisation formateurs de la personnalité. » Nous ressentons ici combien le travail de Jung vise un enjeu de toute une vie : construire la différenciation en évitant la dissociation.